Adieu, Gonzague !

Un Académicien nous quitte

La vie d’une académie est à l’instar des fleuves et des rivières, semblable à celle de toutes les communautés humaines aussi : ce que l’on perd, il faut le remplacer, faire tourner ainsi la grande roue de la destinée.

L’Académie Alphonse Allais n’y manque pas. Elle intronise les nouveaux maillons de la chaîne, et, à l’autre bout, elle en voit disparaître. Quand les jeunes viennent remplacer les anciens dont la mort est en quelque sorte naturelle, on s’habitue. On est triste de quitter les uns, heureux d’accueillir les autres – mais le cycle est, somme toute, celui de la nature.

Parfois, hélas, un maillon de notre chaîne d’amitié, d’humour et de joie de vivre vient à se briser bien avant la fin du cycle. Et là, c’est plus difficile à accepter. Il le faut bien pourtant : nous sommes des êtres humains… mais on a le droit d’être plus tristes encore.

Gonzague Saint Bris et son parrain Alex Vizorek, le 20 octobre 2014

Cet été, nous venons de perdre l’un de ceux-là, un de nos maillons les plus brillants, les plus actifs, les plus doués de sa génération : Gonzague Saint Bris est mort accidentellement. Il avait soixante-neuf ans. Quarante livres publiés, d’autres ouvrages auraient suivi sans doute. Vingt salons littéraires de portée nationale : « La Forêt des Livres »… Il aurait dû y en avoir bien d’autres à venir, sous sa création et sa houlette.

Parrainé dans notre Académie par Alex Vizorek, Gonzague ne boudait pas ses participations. Il était à nos côtés lors des cérémonies d’intronisation, de nos salons littéraires (dont le sien propre), de nos trophées des Alphonses de l’Absurde Raisonné… Il préparait même un spectacle que nous devions accueillir prochainement.

Sa manière de grandeur enfantine, sa crinière de poète, son rire éclatant, ses interventions lumineuses, sa faconde, ses passions romantiques nous manqueront. À l’autre bout de la chaîne, un nouveau maillon viendra prendre la relève. Il aura fort à faire.

Xavier Jaillard